Le raisin dans tous ses états – Partie 2 : Marc et Fine de Bourgogne

Pour ce deuxième volet, direction la Bourgogne où nous avons rencontré cinq producteurs qui participent à l’essor et au renouveau de ces deux eaux-de-vie.

Après vous avoir emmené en Alsace, Monsieur Baco vous fait visiter l’une des plus prestigieuses régions viticoles de France : la Bourgogne. Comme dans d’autres régions en France, la distillation de Marc et de Fine de Bourgogne ne date pas d’hier et semble même à l’aube d’un renouveau comme en témoigne la récente création des appellations d’origines contrôlées et l’arrivée sur le marché de nouveaux distillateurs. Nous vous présenterons également cinq producteurs qui illustrent la variété de styles qui parsèment la scène des spiritueux locaux. 

Un peu d’histoire 

On peut dater la distillation de Marc de Bourgogne vers la fin du XVIIème et la qualité des eaux-de-vie de vin de Bourgogne a été documentée à partir du XVIIIème siècle. 

Contrairement au Marc qui est issu d’une matière qui n’a plus grande utilité et qui peut donc être utilisée en quantité pour la distillation, la Fine rentre en concurrence directe avec la popularité des vins de Bourgogne. C’est la raison pour laquelle, la production d’eaux-de-vie de vin de Bourgogne a toujours été plus faible que celle du marc. En effet, la très forte demande pour les vins de Bourgogne a toujours incité les viticulteurs à vendre leurs vins tels quels plutôt qu’à les distiller et à vendre l’eau-de-vie en résultant. 

Le marc a quant-à-lui connu une certaine popularité dans la première partie du XXème siècle grâce à l’Exposition Universelle de 1900 et à plusieurs œuvres artistiques (tableau de Picasso, romans de Pierre Benoit et Henri Queffélec…).

Les Appellations d’Origine Contrôlée

Ce n’est qu’en 2011 que les producteurs ont réussi à faire protéger leurs eaux-de-vie par une AOC. Les deux cahiers des charges présentent beaucoup de similarités : 

Marc de Bourgogne & Fine de Bourgogne

  • Aire géographique : 388 communes réparties sur les départements de la Côte-d’Or, le Rhône, la Saône-et-Loire et l’Yonne. 
  • Cépages autorisés : aligoté B, césar N, chardonnay B, gamay N, gamay de Bouze N, gamay de Chaudenay N, melon B, pinot noir N, pinot gris G, pinot blanc B, sacy B, sauvignon B, tressot R.
  • Les vins chargés de lies fines destinés à la distillation ne peuvent excéder 3% du volume produit sur une exploitation. 
  • Distillation : 
    • Les marcs doivent être distillés au plus tard le 31 mars suivant la vendange et les marcs non égrappés au plus tard 60 jours après leur conditionnement. 
    • La distillation s’effectue de façon discontinue.
    • L’alambic doit être constitué de maximum 3 vases (max 630 litres) à chargement successif et maximum 3 colonnes de concentration montées en série (maximum 7 plateaux).
    • La chauffe peut être effectuée à feu nu ou à injection de vapeur.
    • Le titre alcoolique volumique (TAV) en sortie d’alambic ne doit pas excéder 72°. 
  • Vieillissement : 
    • La température et l’hygrométrie des chais doivent être naturelles et ne peuvent pas être contrôlées de façon électrique. 
    • Les contenants doivent être en chêne et ne doivent pas excéder 60hl. 
    • Durées de vieillissement : 
      • Minimum 2 ans pour les Marcs et 3 ans pour les Fines.
      • Mention ‘Vieux/Vieille’ minimum 3 ans pour les Marcs, 4 ans pour les Fines.
      • Mention ‘Très vieux/Très vieille’ = 6 ans minimum.
      • Mention ‘Hors d’âge’ = 10 ans minimum. 
  • Étiquetage : interdiction de faire suivre l’appellation par un cépage ou une aire géographique. 
  • La coloration et l’édulcoration sont autorisées.
  • Les eaux-de-vie doivent titrer au minimum 40°. 

N’hésitez pas à visiter le site du syndicat des Eaux-de-Vie de Bourgogne.

Panorama des producteurs et des styles

Toutes les eaux-de-vie présentées ci-dessous ont été dégustées deux par deux, dans les mêmes verres sur une durée d’une heure environ. Les échantillons ont été offerts par les producteurs.

Maison Jacoulot : l’incontournable.

Historique

Si la Maison Jacoulot n’est pas la plus ancienne maison de spiritueux de Bourgogne (les liquoristes Briottet et Joseph Cartron remportent la bataille de la longévité), elle est incontestablement la plus vieille maison en activité spécialisée dans le Marc et la Fine de Bourgogne. 

Fils d’aubergistes à Romanèche-Thorins, Vincent Jacoulot monte à Paris pour devenir tonnelier car la maison familiale périclite. Là-bas, il découvre l’engouement des gens pour les spiritueux. Il décide donc de revenir monter une distillerie en 1891 au pays du vin et de se démarquer en ne distillant que du pinot noir. Restée dans le giron de la famille Jacoulot pendant près d’une centaine d’années, et un premier passage de témoin, elle appartient depuis 2013 à la famille Vançon qui perpétue un fonctionnement familial (l’entreprise compte 7 employés). 

Fiche technique

  • Distillation : La Maison Jacoulot fait appel à des distillateurs ambulants. Un alambic maison est en construction et permettra d’augmenter la capacité de production. 
  • Vieillissement : la principale force de Maison Jacoulot est le vieillissement. En effet, du fait de son ancienneté sur le marché, la maison possède 4 chais avec des niveaux d’humidité différents et des fûts ayant contenu du vin blanc de contenances différentes (pièces bourguignonnes de 228L, 400L, 500L, 700L, 2 500L, 5 000L ainsi que des foudres de pré-assemblages centenaires de 10 000L). Les fûts de Hospices de Beaune sont des fûts neufs et les cuvées qui en sont issues sont les seules à être millésimées. 
  • Les eaux-de-vie sont embouteillées sans colorant ni sucres ajoutés.

La gamme et les ventes

  • Marc et Fine de Bourgogne : l’Authentique (minimum 7 ans), 15 ans, 20 ans, 25 ans et un Marc millésimée des Hospices de Beaune. 
  • En plus des Marcs et des Fines de Bourgogne, Maison Jacoulot produit également toute une série de liqueurs et de crèmes ainsi que quelques eaux-de-vie de fruits
  • Une gamme de whiskies de la distillerie Tullibardine affinés 2 ans en fûts de Marc.
  • Un rhum de La Réunion (Savannah) transporté par bateau et affiné 12 mois en fûts de Fine de Bourgogne ainsi qu’un rhum avec infusion de cassis complètent astucieusement la gamme. 
  • Certains affinages en fûts étrangers sont en cours. 

Le Marc et la Fine de Bourgogne représentent 50% des ventes de Maison Jacoulot et 30% des ventes globales sont réalisées à l’export (principalement aux USA et en Asie). 

Maison Jacoulot est membre du Cartel, un groupement de distilleries indépendantes regroupant Darroze (armagnac), Drouet (cognac), Michel Couvreur (whisky), Dupont (calvados), Longueteau (rhum agricole) et Metté (eaux-de-vie d’Alsace). Vous pouvez acheter les produits de Maison Jacoulot directement au caveau (l’accueil y est particulièrement chaleureux), sur leur site internet ou dans l’un des nombreux points de ventes répertoriés sur ce dernier. 

Notes de dégustation

L’Authentique Fine (Fine de Bourgogne de 7 ans minimum), 45° (46,15€ les 70cl)

L'authentique Fine de Bourgogne de Maison Jacoulot
  • Couleur : topaze.
  • Nez : plutôt en retenue de prime abord puis de plus en plus démonstratif. Le nez est légèrement vineux avec des notes de fruits (pêche de vigne, griotte), de pâte d’amande, de caramel, de chocolat au lait fourré aux raisins secs ainsi qu’une touche de noisettes pralinées. Avec l’aération, un registre épicé se développe sur la vanille, le gingembre. Le fruit se fait plus gourmand (confiture de framboises, cake aux fruits confits). Une touche de bois de santal complète l’ensemble. 
  • Bouche : l’attaque est moelleuse, le milieu de bouche est marqué par le caramel, la prune compotée, le tabac et les épices (girofle, muscade, cannelle, vanille). La finale est plutôt longue et sur le pruneau, la badiane, le carvi et le tabac. 

L’Authentique Marc (Marc de Bourgogne de 7 ans minimum), 45° (42,55€ les 70cl)

L'Authentique Marc de Bourgogne de Maison Jacoulot
  • Couleur : topaze.
  • Nez : assez vineux. Le nez s’ouvre sur des notes d’amandes, de noisette et de noix fraîche. Une certaine fraîcheur (eucalyptus, sève de pin, humus) sous-tend l’ensemble. On trouve également des notes de cerise à l’eau de vie, de poivre long de Java, de tabac ainsi que d’encaustique. 
  • Bouche : l’attaque est moelleuse, le milieu de bouche est vineux, sur les fruits secs (rappelle le tchourtchkhela, une spécialité géorgienne à base de fruits secs enduits d’une résine de raisin), la gomme à mâcher, la réglisse la confiture de mûre. La finale est moyennement longue sur le tabac blond, la réglisse, le carvi et les fruits secs. 

Fine de Bourgogne ‘Les Grands Âges’ 15 ans, 43° (87€ les 70cl)

Fine de Bourgogne, Les Grands Âges 15 ans de la Maison Jacoulot
  • Couleur : topaze.
  • Nez : assez gourmand avec des notes pâtissières de caramel mou, de viennoiseries sorties du four, de tarte aux mirabelles et de cassonade. Au second plan, un registre plus frais est perceptible avec des notes de verveine. Avec l’ouverture, le fruit s’affirme (prune type quetsche, pêche rôtie) ainsi que les épices (cannelle). Le nez devient également plus vineux. Une touche de fruits secs (noisettes grillées presque pralinées) et de chocolat au lait complète l’ensemble à l’arrière-plan.
  • Bouche : l’attaque est modérée, le milieu de bouche est vineux sur les cerises à l’eau-de-vie, et le carvi. La finale est moyennement longue sur le poivre blanc et la réglisse. 

Marc de Bourgogne ‘Les Grands Âges’ 15 ans, 43° (78,50€ les 70 cl)

Marc de Bourgogne, Les Grands Âges 15 ans de la Maison Jacoulot
  • Couleur : or. 
  • Nez : d’emblée sur la fraîcheur (humus, sève de pin) avec des notes de pâte d’amande, de meuble ciré, de prune rouge compotée, de noix fraîche et de tchourtchkhela. Des épices douces apparaissent avec l’ouverture (cardamome verte, cannelle, carvi). 
  • Bouche : l’attaque est plutôt douce et fraîche sur la gomme de sapin, les noisettes fraîches le carvi et la réglisse. La finale est moyenne-longue sur le poivre noir/le poivre long de Java. 

Marc de Bourgogne, Cuvée des Hospices de Beaune 2007, 43° (à paraître)

  • Couleur : ambre.
  • Nez : assez épicé (quatre épice), pain grillé, pain de seigle. Le boisé est bien intégré. On trouve également une touche d’amande. Le fruit est en retrait par rapport aux autres cuvées avec quelques notes de fruits confits, abricot sec. Avec l’aération, une touche de cire d’abeille apparaît et l’amande se développe. N’est pas sans rappeler un rye à l’ouverture. 
  • Bouche : l’attaque est franche, le milieu de bouche est vineux sur le fruit mûr et confit. La bouche est plutôt sèche ce qui apporte un certain équilibre et une certaine tension. On retrouve un boisé fin qui entoure le fruit. Quelques notes d’épices (gingembre pain d’épices) sont perceptibles. La finale est plutôt longue sur le tabac blond et les épices douces.

Observations : les eaux-de-vie de la Maison Jacoulot sont charnues et gourmandes. La maîtrise évidente du vieillissement apporte aux Marcs et aux Fines une belle complexité. Des eaux-de-vie représentatives de leur appellation respective et qui offrent un plaisir immédiat à la dégustation.


Domaine Guillemot-Michel : le chardonnay.

Le domaine Guillemot-Michel est le dernier viticulteur-distillateur de Bourgogne. Pierrette Michel et son mari Marc Guillemot ont repris le domaine familial de 6,5 hectares situés sur le climat Quitaine dans l’aire d’appellation Viré-Clessé en 1982. La famille Guillemot-Michel cutlive des vignes de Chardonnay âgées d’environ 55-60 ans en biodynamie depuis 1992. Sophie, la fille de Pierrette et Marc, et son mari Gautier gèrent aujourd’hui le domaine. C’est d’ailleurs Sophie qui a lancé la distillation maison. Distillant uniquement du chardonnay contrairement aux autres producteurs, Domaine Guillemot-Michel était une étape immanquable dans notre périple. En plus du Marc et de la Fine de Bourgogne, le domaine produit également un gin (Djinn) et compte lancer de nouveaux produits dans un futur proche. 

Fiche technique

  • Matières premières : le marc de chardonnay est éraflé et mis en fermentation dans des tonneaux de 200-250 litres. Concernant la Fine, les lies fines contenant les levures indigènes ayant conduit la fermentation sont séparées du vin clair et sont prêtes à être distillées.
  • Distillation : Sophie a racheté 2 alambics bourguignons à un distillateur ambulant. Nommés Charly et Gédéon, ils datent respectivement de 1932 et 1952. Ce sont des alambics hybrides car ils sont composés d’un alambic relié à une colonne de rectification, ce qui permet de distiller en une seule passe. Les distillats titrent à environ 55-60° en sortie d’alambic pour le Marc et plus de 60° pour la Fine. 
  • Vieillissement : Les eaux-de-vie sont placées 3-4 ans dans des feuillettes (petits fûts bourguignons de 114 litres) pour la Fine et dans des pièces (228 litres) pour le Marc. Ces fûts ont contenu du vin blanc pendant 10 ans avant d’accueillir les eaux-de-vie. 
  • Les eaux-de-vie sont embouteillées sans édulcoration.

Chaque année, une feuillette de Fine seulement est produite contre 3 ou 4 fûts de Marc. Les quantités commercialisées sont donc très limitées. 

Notes de dégustation

Fine de Bourgogne 2015, 42° (69€ les 50cl)

Fine de Bourgogne, Domaine Guillemot-Michel
  • Couleur : paille.
  • Nez : assez fin, très frais et floral (lys, fleurs blanches). Le fruit est léger avec des notes de pomme fraîchement coupée, une touche de pêche blanche et une pointe de litchi). Avec l’ouverture, des notes de cidre de pomme, de citron confit et de bergamote se développent. Au second plan on trouve un registre herbacé (foin, graines de fenouil) et des notes d’élevage à l’arrière-plan (vanille, noix de macadamia, pointe de noix de coco). Une minéralité sur la craie et le gypse sous-tend l’ensemble. 
  • Bouche : l’attaque est plutôt ronde avant de devenir plus chaleureuse. Le milieu de bouche est relativement vif et marqué par cette minéralité crayeuse accompagnée de notes de bergamote et d’une pointe de vanille et de noix de coco. Un soupçon de musc complète l’ensemble. La finale est longue et chaleureuse sur le poivre blanc et la camomille. 

Esprit de Chardonnay 2016 (Marc de Bourgogne), 42° (45€ les 50cl)

Marc de Bourgogne, Domaine Guillemot-Michel
  • Couleur : paille.
  • Nez : s’ouvre sur des notes rustiques de vieille grange, de meuble ciré, de noix fraîche. Avec l’aération, le nez gagne en fraîcheur. Des notes fruitées de cidre fermier, de pêches au sirop, d’amandes amères et de pommes au four se développent avec un peu de cannelle. Une trame végétale emmenée par des notes d’herbe coupée et d’humus sous-tend l’ensemble. L’aération permet au nez de gagner en finesse (notes de tilleul, de pomme golden et d’amande fraîche).
  • Bouche : l’attaque est douce. Le milieu de bouche est riche et épicé avec des notes de pâte d’amande, de girofle, de noix de muscade, de pomme au four. La finale est boisée et persistante sur le carvi et le genièvre. 

Observations : voici deux eaux-de-vie pures et vibrantes. La Fine est tendue, traçante et démontre une belle finesse tandis que le Marc, plus rustique à l’ouverture développe une belle complexité avec l’ouverture. Deux eaux-de-vie qui valent le détour.


L’Alambic Bourguignon (Sab’s Spirits) : l’innovateur.

L’autre nom incontournable associé au Marc et à la Fine de Bourgogne est incontestablement l’Alambic Bourguignon, anciennement la Distillerie Pigneret reprise par Mathieu Sabbagh en 2018. Ce distillateur ambulant installé à Beaune distille pour plus de 200 vignerons. Certaines eaux-de-vie présentées dans cet article en proviennent même. 

Historique

En 1941, Henri Vincent Pigneret, troisième génération de viticulteurs sur le domaine du même nom achète un alambic pour compléter son activité. Les deux générations suivantes (Henri Georges Pigneret puis ses fils Eric et Joseph Pigneret qui font la distillation une activité à part entière) poursuivront et développeront l’acitvité de distillation avant d’être cédée à Mathieu Sabbagh, ancien Directeur International chez Pernod Ricard. En reprenant la distillerie sous le nom de L’Alambic Bourguignon et sa gamme de spiriteux nommée Sab’s, Mathieu a souhaité rendre leurs lettres de noblesse au Marc et à la Fine de Bourgogne tombés en désuétude dans la seconde partie du XXème siècle en mettant l’accent sur la buvabilité. Mathieu est accompagné pour la production de Paul de Vaucorbeil.

Fiche technique

  • Matières premières : les marcs sont issus de pinot noir tandis que les Fines sont issues de lies de pinot noir et de chardonnay.
  • Distillation : Mathieu peut compter sur un alambic moderne du fabricant allemand Müller constitué de 3 vases, d’une colonne de rectification de 5 plateaux et d’un condenseur (échangeur thermique). Le TAV en sortie d’alambic est d’environ 72°. La distillation s’effectue par injection de vapeur ce qui permet d’obtenir des eaux-de-vie plus délicates. Les queues du premier vase alimentent le second vase et les queues du second vase alimentent le troisième vase avant rectification (la rectification permet d’augmenter le degré d’alcool et de purifier). 
  • Vieillissement : le Marc et la Fine vieillissent respectivement au moins 7 ans et 8 ans en petits fûts Bourguignons ayant contenu du vin avant un affinage de 6 mois en fûts de cognac. Dans l’optique de secouer un peu l’image poussiéreuse de ses alcools et attirer une clientèle plus jeune, L’Alambic Bourguignon commercialise régulièrement des éditions spéciales avec des affinages en fût de whisky (Islay, Speyside…) embouteillés bruts de fûts. L’Alambic Bourguignon possède également un stock de dames-jeannes remontant à la 1ère Guerre Mondiale. 
  • Aucune édulcoration n’est apportée aux eaux-de-vie.

En plus du Marc et de la Fine de Bourgogne, Sab’s Spirits comprend également plusieurs gins originaux (affinage en fût de Puligny, infusion de marc…). Une très belle eau-de-vie de poire, douce et élégante complète également la gamme. Il est possible d’acheter les eaux-de-vie Sab’s sur le site boutique.

L'alambic Müller de L'Alambic Bourguignon.
L’alambic Müller

Notes de dégustation 

La Fine (Très Vieille Fine de Bourgogne), 46° (59€ les 50cl)

Sab's, La Fine (Fine de Bourgogne)
  • Couleur : topaze.
  • Nez : Plutôt discret et floral avec des notes de foin, de fleurs jaunes (pissenlit, camomille). Quelques épices (curry jaune, muscade) ainsi qu’une touche de miel d’acacia complètent l’ensemble. 
  • Bouche : l’attaque est modérée. On retrouve l’épice en milieu de bouche avec des notes de curry et de fruits secs grillés. La finale est plutôt courte sur la pomme cuite au four et le curry pimenté. 

Le Marc (Très Vieux Marc de Bourgogne), 46° (49€ les 50cl) 

Sab's, Le Marc (Marc de Bourgogne)
  • Couleur : or. 
  • Nez : assez frais avec une trame végétale assez élégante. Notes de raisin frais et mûr ainsi qu’une touche de litchi. Une vague de fraîcheur se développe avec l’aération (eucalyptus, menthe) et tend vers des tonalités médicinales. Une touche de cire d’abeille et de pâte de fruit ainsi qu’un registre floral (géranium, touche de chèvrefeuille) se font sentir à l’arrière-plan. 
  • Bouche : l’attaque est modérée. Le milieu de bouche est de volume plutôt fin sur le raisin frais, la violette et le sapin. La finale est moyennement longue sur le raisin mûr et la violette. 

Marc Special Cask 1st fill Peated Islay Bourbon Finish, 51° (épuisé)

Sab's, Marc de Bourgogne Special Cask Peated Islay Bourbon cask
  • Couleur : topaze.
  • Nez : s’ouvre sur les algues et les cendres froides avant de laisser la place au fruit (raisin mûr, prune, pomme). On retrouve la cire d’abeille et une touche de pâte d’amande ainsi que des notes d’embruns marins. Quelques notes plus céréalières apparaissent avec l’aération et la fraîcheur se poursuit sur des notes d’eucalyptus et de camphre. 
  • Bouche : l’attaque est marquée et vineuse. Le milieu de bouche est assez sec et caractérisé par des notes de malt et de cendre et complété par une touche de citron et d’iode. La finale est plutôt longue sur la cendre, le raisin mûr et une touche de réglisse.

Fine Special Cask 1st fill Peated Islay Bourbon Cask Finish, 56° (épuisé)

Sab's, Fine de Bourgogne Special Cask Peated Islay Bourbon
  • Couleur : ambre.
  • Nez : plutôt discret. S’ouvre sur de légères notes empyreumatiques de feu de bois, de chocolat noir. On discerne un fruit assez vif sur le zest de citron, la pomme fraîche ainsi qu’une touche de prune compotée. Au second plan on trouve un registre frais emmené par des notes d’embruns marins, de poivre du Sichuan, de feuille de kéfir. Avec l’ouverture des notes de poivre long de Java et de cendre froide se développent. 
  • Bouche : l’attaque est marquée et le milieu de bouche est herbacé (estragon, poivre du Sichuan) complété par des notes de poire et de cacao. La finale est relativement longue, cendrée, sur les fruits secs et le cacao. 

Observations : Mathieu Sabbagh signe des eaux-de-vie modernes. La précision du Marc est particulièrement impressionnante tandis que la Fine semble plus timide. Les éditions spéciales sont un bon moyen de confronter les aromatiques de deux alcools très différents et de faire entrer le Marc et la Fine de Bourgogne dans la modernité. Si le Marc Peated conserve ses caractéristiques au nez, il cède le pas au malt en bouche tandis que la Fine Peated emprunte la même discrétion que la cuvée originale mais témoigne d’une belle fraîcheur et d’un équilibre bien trouvé. 


Domaine Boris Champy : l’irréductible.

Le domaine a été créé par Didier Montchovet en 1984. C’est le domaine bourguignon certifié en biodynamie depuis le plus longtemps par Demeter. Repris en 2019 par Boris Champy, le domaine s’étend aujourd’hui sur 12 hectares (Hautes-Côtes de Beaune avec les parcelles Montagne de Cras, le Clou et En Bignon ainsi que 3 autres parcelles : Pommard En Bœuf, Beaune 1er Cru : Aux Coucherias et Les Vignes Franches). En plus des vins issus du vignoble, Boris Champy possède une activité de négoce (certifiée bio) sous le nom ‘Le Petit Aigle’. 

En rachetant le domaine, Boris Champy a également racheté les stocks de Marc et de Fine de Bourgogne de son prédécesseur. Avec moins d’une dizaine de fûts, il s’agit d’une production très confidentielle. Les eaux-de-vie ont été distillées par la distillerie Pigneret puis par l’Alambic Bourguignon. 

Conseillé par Jean-Arnaud Frantzen des whiskies Michel Couvreur (situés non loin du domaine), Boris Champy a embouteillé un unique Marc de pinot noir assemblé à partir d’une majorité de marcs distillés en 2003 complété par un peu de marcs distillés en 2014. Il s’agit donc d’un très vieux marc embouteillé brut de fût à 46,9° sans édulcoration. Les stocks contiennent également un Marc de Bourgogne 2020 distillé à partir de chardonnay et d’aligoté ainsi qu’une Fine de Bourgogne de 2018 distillée par Matthieu Sabbagh et une Fine de Bourgogne de 2000 titrant aujourd’hui à 50° et placée dans 2 fûts (1 fût neuf de 32 litres et 1 fût de 60 litres comprenant des douelles de fût de cognac). 

Vu les volumes, la production est très limitée et Boris Champy souhaiterait dans l’idéal remplir 1 ou 2 futs par an. 

Le Très Vieux Marc Ultreîa peut être acheté en direct au domaine à Nantoux (où vous aurez le plaisir de découvrir la gentillesse et l’humour de Boris) ou sur le site Grands Bourgogne

Boris Champy
Boris Champy

Note de dégustation 

Très Vieux Marc de Bourgogne Ultreîa, 46,9° (environ 85€ les 50cl)

Très Vieux Marc de Bourgogne, Ultrêia, Boris Champy
  • Couleur : cuivré.
  • Nez : s’ouvre sur une certaine rusticité avec un rancio déjà bien perceptible et une touche de cuir. L’alcool laisse progressivement place à un joli fruité sur une prune très mûre, le raisin frais, des fruits confits. On trouve des épices douces (vanille notamment). Avec davantage d’ouverture, des notes pâtissières se développent (pain aux raisins, clafoutis aux cerises, cassonade, cake aux fruits confits, orangettes). A l’arrière-plan on trouve un registre plus en fraîcheur avec quelques notes de verveine et de lointaines touches de rose. 
  • Bouche : l’attaque est franche, la matière est dense, un peu rugueuse. Une certaine minéralité et un boisé fin sont entourés par les notes de rancio (dattes, noisettes torréfiées). La bouche reste salivante jusqu’au bout. La finale est relativement longue emmenée par des notes de pruneau accompagnées d’une une étonnante fraîcheur (touche de menthe) qui persiste jusqu’au bout. 

Observations : cette eau-de-vie un peu rustique de prime abord a besoin d’aération pour révéler sa profondeur et sa complexité. Une eau-de-vie racée, mature qui cache bien son jeu et qui n’a rien à envier à un vieil armagnac. On attend avec impatience que soient embouteillées les eaux-de-vie distillées plus récemment. 


Distillerie Mazy : l’autrice.

Historique

Fondée en 2016 par Julie Ay dans le paisible village de Marsannay, tout en haut de la Côte-de-Nuits, Distillerie Mazy fait partie de cette nouvelle vague de distillateurs qui veulent contribuer à moderniser (sans trahir) ces eaux-de-vie emblématiques du terroir bourguignon. Belle-fille de viticulteur à Gigondas (Domaine Raspail-Ay), Julie Ay a effectué des études de Bio-Chimie. C’est en débutant sa carrière dans la protection des espaces naturels à Gevrey qu’elle commence à se familiariser avec le terroir bourguignon. La découverte d’un manuel décrivant une recette de liqueur dans la bibliothèque de sa belle-famille lui donne l’envie de la recréer. Ainsi, la liqueur Raspail et la liqueur de verveine seront ses premières cuvées. Par la suite, l’accès à une matière première de grande qualité (les marcs) dont beaucoup de vignerons souhaitent se débarrasser achève de convaincre Julie de se lancer dans la production de Marc et de Fine de Bourgogne. 

Fiche technique

  • Matières premières : les marcs proviennent exclusivement de pinot noir de la Côte-de-Nuits tandis que les lies des Fines sont issues de pinot noir et de chardonnay de la Côte-de-Nuits également. Les marcs sont récoltés et distillés directement en sortie de pressoir afin de garantir une fraîcheur optimale.
  • Distillation : 
    • La distillation s’effectue par climat grâce à trois alambics. Les deux vedettes de la Distillerie Mazy sont en effet Joséphine et Gérard, deux alambics chauffés au gaz datant de 1925 et 1930. Joséphine dispose d’une capacité de charge de 100 litres, d’un condenseur à plateaux et est l’alambic privilégié pour les repasses car l’alambic distille très lentement. Gérard dispose quant-à-lui d’une capacité de charge de 181 litres et d’un condenseur à serpentin. En plus de ces deux alambics, Julie fait parfois appel aux services du vieux Lambert, un alambic chauffé au bois datant de 1900 (voire plus vieux) et doté d’une colonne de concentration quand elle a besoin de renfort. 
    • Le Marc titrent environ 65° en sortie d’alambic tandis que la Fine titrent environ 70° en sortie d’alambic. Les coupes sont précises et strictes. 
  • Vieillissement : dans un petit chai vouté semi-enterré au charme incontestable, Julie élève patiemment ses eaux-de-vie dans différents types de fûts. L’élevage s’effectue par climat et par année dans des fûts fournis par les domaines ou par des tonnelleries partenaires (la Tonnellerie de l’Atlantique qui fournit des fûts à gros grains, les tonnelleries Rousseau et Montgillard qui fournissent des fûts avec des chauffes spécifiques). Julie utilise des fûts de contenances différentes : principalement des feuillettes (114 litres) et des quarteaux (57 litres) mais aussi d’anciens fûts de cognac. Les réductions sont effectuées au goutte-à-goutte sur plusieurs années.
  • Julie n’ajoute ni sucre ni colorant à ses eaux-de-vie (liqueurs exceptées).  
Julie AY et ses alambics. Distillerie Mazy
Julie AY et ses deux alambics Joséphine (gauche) et Gérard (droite).

La gamme 

  • Les liqueurs : Julie produit 2 liqueurs (une liqueur de verveine et la liqueur Raspail familiale composée de 10 plantes et épices dont une forte proportion d’angélique). Dans les deux cas une macération dans de la Fine est effectuée avant une troisième distillation et l’ajout de caramel maison. La verveine est vieillie en cuve inox tandis que la liqueur Raspail subit un élevage perpétuel de type solera. 
  • Les eaux-de-vie de fruits : Julie produit également une eau-de-vie de poire Williams rouge vieillie 4 ans en dame-jeanne et une eau-de-vie de reine-claude dorée vieillie 4 ans en fûts ayant contenu du Beaumes-de-Venise. Moins de 200 bouteilles sont produites pour chaque fruit chaque année. 
  • Le Marc et la Fine de Bourgogne : le cœur de gamme contient plusieurs Marcs et Fines. Concernant les Marcs, différentes cuvées sont produites par millésimes tandis que 2 Fines sont produites chaque année : La Divine (assemblage de premiers crus) et La Grande (assemblage de grands crus). Les assemblages sont effectués par niveau d’appellation (pas de mélange premier cru/grand cru par exemple).
Gamme d'eaux-de-vie de la Distillerie Mazy
Gamme d’eaux-de-vie et de liqueurs de la Distillerie Mazy

Chaque cuvée s’accompagne d’une fiche technique ultra-détaillée indiquant, la proportion de plantes, les domaines fournisseurs, le type de fûts utilisés…  

La liste des revendeurs est disponible ici. Il est possible d’acheter les eaux-de-vie en direct auprès de Julie.

Notes de dégustation

  • Fine de Bourgogne, La Divine, 2018, CN-FB-18, 43,5° (envi. 38€ les 50cl. Fiche technique)
    • Couleur : topaze. 
    • Nez : un nez assez fin mêlant fruits et fleurs jaunes saupoudrés d’épices. Notes de reine-claude, de pissenlits, de frangipane, d’épices douces (cannelle, vanille), de bois ciré ainsi que de chèvrefeuille. Avec l’ouverture des notes de miel de montagne se développent ainsi que de discrètes notes de pain toasté à l’arrière-plan.
    • Bouche : l’attaque est assez douce. Le milieu de bouche est marqué par le chocolat au lait, les graines de fenouil, les noisettes grillées et des notes de cardamome. La finale est plutôt courte sur les épices douces. 
  • Fine de Bourgogne, La Grande, 2018 GC-FB-18, 44° (env. 46€ les 50cl. Fiche technique)
    • Couleur : or.
    • Nez : assez frais et peu démonstratif au début. On trouve des notes florales (lilas), fruitées (pêches rôties), herbacées (verveine), le tout enrobée d’une belle rondeur beurrée. Le beurré s’installe avec l’ouverture, toujours accompagné de cette trame fraîche et herbacée (vétiver, eucalyptus, genièvre). Le registre fruité évolue vers la mirabelle quant-à-lui.
    • Bouche : l’attaque est douce, le milieu de bouche est floral et fruité (mirabelle encore) avec une pointe de chocolat au lait. La finale est fraîche et plutôt longue sur la verveine citronnée et les graines de fenouil.
  • Marc de Marsannay 2016, MS-AS-16, 44,5° (env. 32€ les 50cl. Fiche technique)
    • Couleur : or.
    • Nez : notes de raisins secs, sureau, poivre noir, touche de mûre, poire pochée. Le second-plan est plus en fraîcheur avec des notes de tiges de fleurs, de feuilles de camphrier et d’eucalyptus. La fraîcheur gagne en amplitude avec l’ouverture. 
    • Bouche : l’attaque est modérée. Le milieu de bouche est marqué par des notes de raisin de Corinthe, d’épices (camphre, poivre blanc, réglisse) et de fleur de sureau. La finale est moyennement longue sur la violette, le sureau et la réglisse. 
  • Marc de Bourgogne, Le Premier, 2018, PC-MB-18, 45° (en. 38€ les 50cl. Fiche technique)
    • Couleur : or.
    • Nez : nez plutôt floral comme lorsque l’on pénètre chez un fleuriste. Notes de fleurs fraîchement cueillies, de feuilles de figuier, d’églantine, de tilleul complétées par une touche d’humus. Le second plan est plus épicé (safran, cannelle, vanille, pointe de camphre). Le nez gagne en suavité avec l’ouverture (raisins secs, orgeat).
    • Bouche : l’attaque est plutôt douce. Le milieu de bouche est floral et fruité (touche de violette, confiture de fruits rouges). La finale est moyenne-longue et davantage sur l’épice (poivre blanc, muscade). 
  • Marc de Bourgogne, Le Grand, 2018, GC-MB-18, 46° (env. 46€ les 50cl. Fiche technique) 
    • Couleur : topaze.
    • Nez : plutôt vif avec un boisé soutenu. On décèle des notes de cèdre et de zeste de bergamote au début, suivies de notes fruitées (abricots, citron confits, bergamote, pamplemousse), de cire d’abeille et de bois ciré ainsi que des notes plus florales (touche de lavande) et d’herbes aromatiques (thym). Avec l’aération des notes camphrées se développent ainsi que les épices (muscade, girofle, cannelle).
    • Bouche : l’attaque est modérée. Le milieu de bouche est fruité (confiture d’abricots) et épicé (carvi, badiane, cardamome verte, vanille). La finale est acidulée et relativement longue. 

Observations : beaucoup d’élégance dans ces eaux-de-vie. Le nez de La Divine a beaucoup de présence et de raffinement, La Grande présente une très belle fraîcheur tandis que Le Premier se montre très élégant et que Le Grand surprend par ses accents sudistes. Les finales manquent parfois un peu de longueur mais cette jeune distillerie possède un formidable potentiel. On retrouve toute la méticulosité et la passion de Julie dans son travail. De très très beaux rapports qualité/prix pour ne rien gâcher. 


Ce qu’il faut retenir 

Le Marc et la Fine de Bourgogne sont deux eaux-de-vie protégées par une AOC. Le Marc est produit à partir de marc de raisin tandis que la Fine est produite à partir de lies fines de vin. Si le cahier des charges autorise 13 cépages, deux sont communément utilisés (le pinot noir principalement et le chardonnay). Les eaux-de-vie doivent être vieillies au moins 2 ans pour les Marcs et 3 ans pour les Fines en fût de chêne. Quelques distillateurs ambulants produisent le majorité des eaux-de-vie tandis que les distilleries fixes sont rares. On observe globalement que les Marcs de Bourgogne présentent un registre plus végétal ainsi que des notes de noix, de meuble ciré et d’humus tandis que les Fines présentent souvent un registre plus fruité et pâtissier. Généralement, les eaux-de-vie de vignerons sont souvent plus brutes, spontanées, et vibrantes tandis que les eaux-de-vie de distilleries sont plus domptées et sophistiquées.

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